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ANNABEL - Un roman délicat de Kathleen Winter


En premier lieu, ce qui m'a attiré dans ce roman, c'est sa couverture. Un homme, aux traits androgynes, cette typographie rose et ce titre: "Annabel". Il y a une ambiance froide, douce et délicate qui se dégage de ce graphisme. Le regard du personnage m'attirait.


C'est donc d'abord pour sa couverture, que je me suis penchée sur le roman de Kathleen Winter (publié aux éditions 10-18). Mais en plus de son apparence intrigante, "Annabel" a bien du fond. En effet, il retrace la vie d'une personne née avec deux sexes, féminin et masculin, et parle de son combat pour trouver sa place dans ce monde parfois dur, de sa naissance, jusqu'au début de sa vie d'adulte.

Quatrième de couverture:

1968, un bourg côtier du Labrador au Canada, Un enfant naît, ni garçon ni fille. Hermaphrodite. Ils sont trois à partager ce secret: les parents et une voisine de confiance. On décide de faire opérer l'enfant: ce sera Wayne - le choix du père. Mais dans l'eau trouble de l'adolescence, son moi caché, cette Annabel qui l'accompagne comme une ombre, réapparaît. Et avec elle, la vérité. Un magnifique roman sur la différence et l'identité, porté par une langue poétique où vibrent intimement la Nature et les êtres.

L'auteur nous cueille, dès les premières pages, avec sa plume fine. Certains paragraphes sont comme de la dentelle. Les paysages sont sublimes. Durant tout le livre, la majesté de la nature nous accompagne, et l'auteur en profite pour glisser de pertinentes métaphores.


Il y a plusieurs lectures à Annabel, on peut se laisser porter par l'histoire, comme se faufiler entre les lignes pour saisir toutes les subtilités jouissantes du texte.


Je ne connaissais pas bien l'hermaphrodisme. Je ne peux pas dire qu'après cette lecture je sois devenue une spécialiste, loin de là, mais en tout cas, elle m'a initiée à un sujet dont on parle peu. Le personnage de Wayne/Annabel m'a fascinée et bouleversée. Je ne vous raconte pas le nombre de fois où j'ai eu envie de le prendre dans mes bras.


La manière déshumanisée dont Wayne/Annabel est traitée par certains médecins m'a comprimé le ventre. Car, cette pulsion ridicule de vouloir "normaliser" le corps de leurs patients, de ne pas discuter avec eux pour connaître leur avis, de les traiter comme une sorte "d'expérience", est un fait auxquelles plusieurs personnes se voient confrontées dans la réalité, comme pourrait le confirmer le témoignage de certains de ces jeunes intersexués :

Les testicules de Pidgeon et Alice ont été retirées sans raison. Des médecins essayent de convaincre Emily de retirer les siennes, alors qu'elle est en parfaite santé. Saifa a été opéré, alors qu'il s'identifie comme un garçon.

Les parents de Wayne/Annabel sont très intéressants; tantôt admirables, tantôt complètement dans l'erreur. Le regard des autres sur la différence de leur fils/fille, les terrifie. Ils sont touchants, car ils possèdent plusieurs facettes et leur relation avec Wayne/Annabel est complexe. L'auteur ne porte pas vraiment de jugement sur leur façon d'agir. Je l'ai trouvée plutôt respectueuse et non pas culpabilisante et moralisatrice.


Thomasina, l'amie dans la confidence, est également un personnage fort. A contre-courant des idées habituelles des habitants du Labrador, elle cherche à soutenir Wayne/Annabel. Elle est très charismatique, même si je ne peux pas m'empêcher de trouver glauque le fait qu'elle appelle Wayne "Annabel", un prénom lourd de sens pour elle...


Enfin, il y a Wally, une fille exceptionnelle, qu'il était agréable de découvrir entre ces pages. Elle incarne en parallèle de Wayne/Annabel, la volonté de se construire/reconstruire, la lutte pour devenir qui l'on est. Son amitié avec le/la protagoniste est raffraîchissante.

Cette découverte m'a vraiment plu, j'ai lu très rapidement ces 470 pages pleines de poésie. J'ai pleuré, car certaines épreuves que traversent Wayne/Annabel, sont proprement terribles. Mais j'ai aussi été happée par la beauté du style de Kathleen Winter. On sort enrichi(e) de cette lecture, qui crée des ponts (image très forte dans ce livre) entre des gens considérés comme différents.


Il est donc utile de glisser Annabel entre toutes les mains possibles...


Et toi ? As-tu lu Annabel ? Est-ce un sujet qui t'intéresse ?



"Si ce livre était un plat", ce serait une pâtisserie à la rose


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